Site (nom antique): Burdigala Site (nom moderne): Bordeaux.
Province romaine: Aquitania.
Localisation: France/Aquitaine/Gironde/Bordeaux
Support: Autel.
Matériau: Grès d'York (vraisemblable).
Décor: Le plateau de l'autel a disparu (trace sur la face 4). Quatre pilastres d'angle ; sur la face 1, ils sont creusés d'un sillon vertical entouré d'un trait incisé, pour évoquer des cannelures ; bases à deux tores. Socle en saillie. À la partie supérieure de la face 1, les pilastres encadrent une scène de sacrifice, traitée en bas-relief (hauteur conservée 0,25 m), dont les personnages sont acéphales : au centre, la Tutelle, assise, tient une corne d'abondance dans son bras gauche et tend un objet indistinct (gerbe ? bouquet ?) de la main droite. À gauche, un taureau, de face, et un personnage lui aussi de face, prêtre ou assesseur, ayant devant lui un objet indistinct. À droite, le dédicant, vêtu d'une tunique, tend le bras droit vers un autel placé devant lui. Ce bas-relief est séparé du champ épigraphique par une frise de cinq feuilles d'acanthe en relief très plat. Face 2, à hauteur du bas-relief précédent, sanglier dans un cadre en creux ; on doit sans doute le comprendre comme le symbole d'York, “ville du sanglier”, bien que le sens le plus évident de *eburo- soit “if” (Rivet & Colin Smith 1979, p. 355-357 ; Delamarre 2001, p. 134). Vers le bas de la face 4, dans un cadre semblable, dieu-fleuve allongé (Garunna ?). On trouve ainsi une allusion à la ville de départ (Eboracum) et à la ville d’arrivée, celle de la Garunna (Bordeaux).
Dimensions: [122]/[71]/[65]
Lieu de découverte: Bordeaux.
Contexte local: Rempart gallo-romain.
Conditions de découverte: 2-4, rue du Pont-de-la-Mousque. Mise au jour du rempart gallo-romain en 1921.
Lieu de conservation: Bordeaux.
Institution de conservation: MAB.
N° inventaire: 60.1.354.
Description du champs épigraphique: Entre la frise de feuilles d'acanthe, le socle et les deux pilastres.
Dimensions:48,5/44,5 État de conservation: Bon. Légère usure due à l'érosion.
Écriture: Capitale carrée.
Style écriture: Capitale carréeLettres aux sillons peu profonds, très soigneusement et finement gravées. E, et parfois aussi P (l. 8), ont la barre supérieure prolongée à gauche de la haste verticale. Goût caractéristique de l'époque, pour les ligatures, plus fréquentes à la fin des lignes pour les nécessités de la mise en page : l. 1 (TE) ; l. 2 (A) ; l. 3 (A, EB, avec E rétrograde) ; l. 4 (LI, avec I inclus ; PR, avec P rétrograde ; NF) ; l. 5 : (AM) ; E, avec E rétrograde) ; l. 6 (EB, avec E rétrograde ; CT, avec T inclus) ; l. 8 (ER, avec E rétrograde ; ET (bis) avec E rétrograde ; NE). Lettres de petit corps, pour abréger (I, l. 4 ; T, l. 6 ; O, l. 8).
Type de texte: Dédicace votive.
Datation du texte: 237Datation consulaire dans le texte
Justificatif datation: Datation consulaire dans le texte.
Édition corpus: Mensignac 1920-1921De , p. 117, photo, pl. IV ; Jullian 1921
, p. 361 ; Courteault 1922
, p. 236-246 ; ILTG
, 141 ; zoteroItem_T6WDZX78
, 19, photo ;
Commentaire bibliographique:
E 6932, photo ; Étienne 1962
, p. 173 ; Valensi 1971
, p. 61-62, 44 ; Bost 2002
, p. 23 ;
Texte
Traduction: À la déesse Tutelle Boudig(a ?), Marcus Aurelius Lunaris, sévir augustal des colonies d'York et de Lincoln, province de Bretagne Inférieure, avait fait le voeu d'élever un autel à son départ d'York. Il s'est acquitté de son voeu de bonne grâce et à juste titre, sous le consulat de Perpetuus et de Cornelianus
Apparat critique: L. 1: malgré l'usure de la pierre qui masque le haut de la barre droite de la lettre, il ne fait aucun doute qu'on doive lire BOVDIG à la fin de la ligne, comme Courteault (et, à sa suite, Jullian, Wuilleumier) ; Heichelheim, Valensi : Bourdig(alae) ou Bourdig(alensis) ; Étienne : Bourdigal(ae) ou Bourdigal(ensis), à tort. Le O serait incongru dans la transcription latine : la lecture Burdigala (ou Burdegalo) est constante (supra, p. 45), et le R est à coup sûr absent sur la pierre. L. 6, Courteault, Wuilleumier, Valensi : auect(us)
.
Remarques: Au sommet de la face 1, la scène de sacrifice a permis d'enrichir la personnalité de la Tutelle. Elle a été identifiée à Cybèle, par Courteault, Valensi, Étienne, en raison, notamment, du taureau sacrifié ; de plus, cette divinité syncrétique s'enrichirait de la personnalité de Cérès par les attributs qu'elle présente de sa main droite, une botte d'épis et même des pavots, selon ces auteurs. Pour expliquer le qualificatif BOVDIG, l'hypothèse d'une Tutelle “bretonne” a été avancée : Lunaris aurait décoré la déesse (bordelaise en l'occurrence) du surnom breton évocateur de Boudig(a) = Boudicca (“La victorieuse”), en raison des victoires récentes de Maximin sur les Gaulois (? Wuilleumier, ILTG, à la suite d'une suggestion de Courteault) ; outre cette justification hasardeuse, on voit mal le lien qui peut être établi entre la Tutelle et la Victoire.
La restitution Bou(r)dig(ala) ou Bou(r)dig(alae) doit donc être refusée, alors que de savants commentaires historiques lui ont donné créance. Proposée par Heichelheim (RE, VIIA [1939], col. 1602, s.u. Tutela), elle a été acceptée par
Étienne (1962, p. 173) et
Van Andringa (2002 , p. 204 n. 81). Elle met en relief le caractère local de la déesse ; la ville est assimilée à la Tutelle (Burdigala), ou bien elle identifie la déesse (Burdigalae). Le nom de la ville est accolé à celui de la déesse à Périgueux par deux inscriptions :
CIL , XIII, 956 = ILA, Pétrucores, 11 : Tutela Vesunnia ou Vesunniae ;
CIL , XIII, 949 =
ILA, Pétrucores , 24 : Tutela Vesunna ou Vesunnae. L'épiclèse initiale dea attache cette Tutelle au panthéon indigène, comme, toujours en Aquitaine, chez les Convènes (
CIL , XIII, 159 ; 246 : Deo Tutelae), les Ausques (
CIL , XIII, 439), et encore les Pétrucores (
CIL , XIII, 939 =
ILA, Pétrucores , 16).
L'autel est (semble-t-il) taillé dans les carrières de grès d'York : le texte suggère bien qu'il ne devait être orné, gravé et consacré qu'à la fin du voyage : c'était contraindre la déesse à lui donner une heureuse issue.
L'iconographie des faces latérales du monument commente encore le texte par les identifications vraisemblables des reliefs, les allégories d'York Eburacum/Eboracum (face 2, Courteault, d'ap. Jullian), au point de départ de la navigation (l. 6) et de Bordeaux, représentée par le dieu-fleuve de la face 4 (supra).
La fonction de sévir augustal dénonçant un affranchi, le prénom et le gentilice du dédicant, M. Aurelius, laissent présumer que son patron devait la citoyenneté romaine à la constitution antoninienne. L'inscription ne dit rien de ses activités, mais cet ex-voto offert à la suite d'une navigation heureuse laisse imaginer que la cargaison embarquée représentait un fort enjeu ; l'autel de Bordeaux semble en effet s'insérer dans le courant commercial entre la Bretagne et l'Aquitaine, comme le suggère avec prudence A.
Chastagnol 1981 , p. 63-66.
Bost 2002 , p. 23 n. 50, suppose qu'à York et à Lincoln, ses affaires étaient liées au ravitaillement des garnisons d'York et du mur d'Hadrien ; elles devaient alors l'appeler à s'approvisionner sur le continent. D'York et de Lincoln, les deux colonies où il était dignitaire municipal, Lunaris s'est donc lancé dans l'aventure du commerce avec Bordeaux. L'ex-voto à la Tutelle suggère en effet que c'était pour lui une première
.
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URI : http://petrae.huma-num.fr/160100900019
©2008
Milagros Navarro-Caballero, Louis Maurin
- Encodage en TEI : Nathalie Prévôt
Province romaine: Aquitania.
Localisation: France/Aquitaine/Gironde/Bordeaux
Support: Autel.
Matériau: Grès d'York (vraisemblable).
Décor: Le plateau de l'autel a disparu (trace sur la face 4). Quatre pilastres d'angle ; sur la face 1, ils sont creusés d'un sillon vertical entouré d'un trait incisé, pour évoquer des cannelures ; bases à deux tores. Socle en saillie. À la partie supérieure de la face 1, les pilastres encadrent une scène de sacrifice, traitée en bas-relief (hauteur conservée 0,25 m), dont les personnages sont acéphales : au centre, la Tutelle, assise, tient une corne d'abondance dans son bras gauche et tend un objet indistinct (gerbe ? bouquet ?) de la main droite. À gauche, un taureau, de face, et un personnage lui aussi de face, prêtre ou assesseur, ayant devant lui un objet indistinct. À droite, le dédicant, vêtu d'une tunique, tend le bras droit vers un autel placé devant lui. Ce bas-relief est séparé du champ épigraphique par une frise de cinq feuilles d'acanthe en relief très plat. Face 2, à hauteur du bas-relief précédent, sanglier dans un cadre en creux ; on doit sans doute le comprendre comme le symbole d'York, “ville du sanglier”, bien que le sens le plus évident de *eburo- soit “if” (Rivet & Colin Smith 1979, p. 355-357 ; Delamarre 2001, p. 134). Vers le bas de la face 4, dans un cadre semblable, dieu-fleuve allongé (Garunna ?). On trouve ainsi une allusion à la ville de départ (Eboracum) et à la ville d’arrivée, celle de la Garunna (Bordeaux).
Dimensions: [122]/[71]/[65]
Lieu de découverte: Bordeaux.
Contexte local: Rempart gallo-romain.
Conditions de découverte: 2-4, rue du Pont-de-la-Mousque. Mise au jour du rempart gallo-romain en 1921.
Lieu de conservation: Bordeaux.
Institution de conservation: MAB.
N° inventaire: 60.1.354.
Description du champs épigraphique: Entre la frise de feuilles d'acanthe, le socle et les deux pilastres.
Dimensions:48,5/44,5 État de conservation: Bon. Légère usure due à l'érosion.
Écriture: Capitale carrée.
Style écriture: Capitale carréeLettres aux sillons peu profonds, très soigneusement et finement gravées. E, et parfois aussi P (l. 8), ont la barre supérieure prolongée à gauche de la haste verticale. Goût caractéristique de l'époque, pour les ligatures, plus fréquentes à la fin des lignes pour les nécessités de la mise en page : l. 1 (TE) ; l. 2 (A) ; l. 3 (A, EB, avec E rétrograde) ; l. 4 (LI, avec I inclus ; PR, avec P rétrograde ; NF) ; l. 5 : (AM) ; E, avec E rétrograde) ; l. 6 (EB, avec E rétrograde ; CT, avec T inclus) ; l. 8 (ER, avec E rétrograde ; ET (bis) avec E rétrograde ; NE). Lettres de petit corps, pour abréger (I, l. 4 ; T, l. 6 ; O, l. 8).
Type de texte: Dédicace votive.
Datation du texte: 237Datation consulaire dans le texte
Justificatif datation: Datation consulaire dans le texte.
Édition corpus: Mensignac 1920-1921
Commentaire bibliographique:
Texte
01 DẸẠE▴TVT͡ELE▴BOVDIG̣ 02 M▴A͡VR LVNARIS IIIIII 03 VIR▴A͡VG▴COL▴E͡BOR▴ET 4 L͡IND▴P͡ROV▴BRIT▴IN͡F 05 AṚAM▴QVA͡M▴VOVE͡R 06 AB E͡BORACI▴EVEC͡T 07 V▴S▴L▴M 8 PE͡RPE͡TVO E͡T▴CORN͡E |
01 dẹạe Tut͡el(a)e Boudig̣(ae), 02 M(arcus) A͡ur(elius) Lunaris ,IIIIII 03 uir A͡ug(ustalis) col(oniarum) E͡bor(aci) et 4 L͡ind(i) p͡rou(inciae) Brit(anniae) In͡f(erioris), 05 aṛam qu͡a͡m uoue͡r(at) 06 ab E͡boraci euec͡t(us), 07 u(otum) s(oluit) l(ibens) m(erito), 8 Pe͡rpe͡tuo e͡t Corn͡e(liano consulibus). |
Traduction: À la déesse Tutelle Boudig(a ?), Marcus Aurelius Lunaris, sévir augustal des colonies d'York et de Lincoln, province de Bretagne Inférieure, avait fait le voeu d'élever un autel à son départ d'York. Il s'est acquitté de son voeu de bonne grâce et à juste titre, sous le consulat de Perpetuus et de Cornelianus
Apparat critique: L. 1: malgré l'usure de la pierre qui masque le haut de la barre droite de la lettre, il ne fait aucun doute qu'on doive lire BOVDIG à la fin de la ligne, comme Courteault (et, à sa suite, Jullian, Wuilleumier) ; Heichelheim, Valensi : Bourdig(alae) ou Bourdig(alensis) ; Étienne : Bourdigal(ae) ou Bourdigal(ensis), à tort. Le O serait incongru dans la transcription latine : la lecture Burdigala (ou Burdegalo) est constante (supra, p. 45), et le R est à coup sûr absent sur la pierre. L. 6, Courteault, Wuilleumier, Valensi : auect(us)
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Remarques: Au sommet de la face 1, la scène de sacrifice a permis d'enrichir la personnalité de la Tutelle. Elle a été identifiée à Cybèle, par Courteault, Valensi, Étienne, en raison, notamment, du taureau sacrifié ; de plus, cette divinité syncrétique s'enrichirait de la personnalité de Cérès par les attributs qu'elle présente de sa main droite, une botte d'épis et même des pavots, selon ces auteurs. Pour expliquer le qualificatif BOVDIG, l'hypothèse d'une Tutelle “bretonne” a été avancée : Lunaris aurait décoré la déesse (bordelaise en l'occurrence) du surnom breton évocateur de Boudig(a) = Boudicca (“La victorieuse”), en raison des victoires récentes de Maximin sur les Gaulois (? Wuilleumier, ILTG, à la suite d'une suggestion de Courteault) ; outre cette justification hasardeuse, on voit mal le lien qui peut être établi entre la Tutelle et la Victoire.
La restitution Bou(r)dig(ala) ou Bou(r)dig(alae) doit donc être refusée, alors que de savants commentaires historiques lui ont donné créance. Proposée par Heichelheim (RE, VIIA [1939], col. 1602, s.u. Tutela), elle a été acceptée par
L'autel est (semble-t-il) taillé dans les carrières de grès d'York : le texte suggère bien qu'il ne devait être orné, gravé et consacré qu'à la fin du voyage : c'était contraindre la déesse à lui donner une heureuse issue.
L'iconographie des faces latérales du monument commente encore le texte par les identifications vraisemblables des reliefs, les allégories d'York Eburacum/Eboracum (face 2, Courteault, d'ap. Jullian), au point de départ de la navigation (l. 6) et de Bordeaux, représentée par le dieu-fleuve de la face 4 (supra).
La fonction de sévir augustal dénonçant un affranchi, le prénom et le gentilice du dédicant, M. Aurelius, laissent présumer que son patron devait la citoyenneté romaine à la constitution antoninienne. L'inscription ne dit rien de ses activités, mais cet ex-voto offert à la suite d'une navigation heureuse laisse imaginer que la cargaison embarquée représentait un fort enjeu ; l'autel de Bordeaux semble en effet s'insérer dans le courant commercial entre la Bretagne et l'Aquitaine, comme le suggère avec prudence A.
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